Depuis une dizaine d'années, le débat autour des OGM, ou Organismes Génétiquement Modifiés, bat son plein. Les participants les plus audibles sont les adversaires convaincus, partisans d'une interdiction totale et immédiate. En face d'eux, quelques scientifiques favorables à la recherche sont acculés à avouer qu'ils ne possèdent (et pour cause !) aucune preuve documentée de l'innocuité à long terme des OGM en question. Et entre les deux, les autorités légifèrent et interprètent leurs propres textes de manière parfois erratique.
Les pro-OGM comme les anti-OGM sont, je l'espère, d'une absolue bonne foi dans leurs arguments. Mais ce que j'entends me laisse parfois supposer soit un peu de manipulation, soit un peu de manque de culture scientifique, soit les deux conjugués !
Je suis mal à l'aise dans cette cacophonie, et je veux simplement apporter une pierre à l'édifice, sans volonté polémique et en présentant des arguments documentés. Ce dossier est long, je n'ai pas réussi à faire mieux !
Pour naviguer dans ce dossier, vous pouvez accéder directement aux différentes sections :
On pourrait en citer bien d'autres, une recherche sur Google® donne plus de 21 millions de pages pour "OGM", et 74 millions pour "GMO", version anglophone d'OGM (ces chiffres ont triplé en 5 ans)
Pour faire court, les OGM sont des organismes vivants (végétaux bien sûr, mais aussi animaux, bactéries, moisissures) dont le patrimoine génétique a été modifié intentionnellement, par des techniques humaines, qui ne font pas intervenir les moyens "naturels". Ces moyens naturels sont :
les croisements entre individus différents. C'est ce qu'on appelle la sélection, elle a conduit à la définition des "races" animales (on connaît surtout les chiens, les chats, mais les animaux d'élevage sont au moins autant sélectionnés, on le constate chaque année lors du Concours Général Agricole du Salon de l'Agriculture);
et les mutations spontanées, qui interviennent naturellement lorsque l'ADN est recopié dans les cellules; bien que rare, ce phénomène est celui qui a conduit, sur des millions d'années, à la biodiversité qui existe aujourd'hui.
Mais il existe des définitions "officielles", et à tout le moins, légales. Nous allons les détailler dans le paragraphe suivant.
(...)
Article 2
Aux fins de la présente directive, on entend par:
"organisme", toute entité biologique capable de se reproduire ou de transférer du matériel génétique;
"organisme génétiquement modifié (OGM)", un organisme, à l'exclusion des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle.
Aux fins de la présente définition:
la modification génétique se fait au moins par l'utilisation des techniques énumérées à l'annexe I A, première partie;
les techniques énumérées à l'annexe I A, deuxième partie, ne sont pas considérées comme entraînant une modification génétique;
(...)
Article 3 exemptions
La présente directive ne s'applique pas aux organismes obtenus par les techniques de modification génétique énumérées à l'annexe I B.
La présente directive ne s'applique pas au transport d'organismes génétiquement modifiés par le rail, par la route, par les voies navigables, par mer ou par air
(...)
ANNEXE I A TECHNIQUES VISÉES À l'ARTICLE 2 POINT 2 PREMIÈRE PARTIE
Les techniques de modification génétique visées à l'article 2 point 2) sous a) sont, entre autres:
les techniques de recombinaison de l'acide désoxyribonucléique impliquant la formation de nouvelles combinaisons de matériel génétique par l'insertion de molécules d'acide nucléique, produit de n'importe quelle façon hors d'un organisme, à l'intérieur de tout virus, plasmide bactérien ou tout autre système vecteur et leur incorporation dans un organisme hôte à l'intérieur duquel elles n'apparaissent pas de façon naturelle, mais où elles peuvent se multiplier de façon continue;
les techniques impliquant l'incorporation directe dans un organisme de matériel héréditaire préparé à l'extérieur de l'organisme, y compris la micro-injection, la macro-injection et la micro-encapsulage;
les techniques de fusion (y compris la fusion de protoplastes) ou d'hybridation dans lesquelles des cellules vivantes présentant de nouvelles combinaisons de matériel génétique héréditaire sont constituées par la fusion de deux cellules ou davantage au moyen de méthodes qui ne sont pas mises en oeuvre de façon naturelle.
DEUXIÈME PARTIE
Les techniques visées à l'article 2 point 2) sous b) qui ne sont pas considérées comme entraînant une modification génétique, à condition qu'elles n'impliquent pas l'emploi de molécules d'acide nucléique recombinant ou d'OGM obtenus par des techniques/méthodes autres que celles qui sont exclues par l'annexe IB, sont :
la fécondation in vitro;
les processus naturels tels que la conjugaison, la transduction, la transformation, ou
L'induction polyploïde.
ANNEXE I B TECHNIQUES VISÉES À l'ARTICLE 3
Les techniques/méthodes de modification génétique produisant des organismes à exclure du champ d'application de la présente directive, à condition qu'elles n'impliquent pas l'utilisation de molécules d'acide nucléique recombinant ou d'OGM autres que ceux qui sont issus d'une ou plusieurs des techniques/méthodes énumérées ci-après, sont :
la mutagénèse;
la fusion cellulaire (y compris la fusion de protoplastes) de cellules végétales d'organismes qui peuvent échanger du matériel génétique par des méthodes de sélection traditionnelles.
Article L531-1 (modifié par la Loi n°2008-595 du 25 juin 2008 - art. 12)
Au sens du présent titre , on entend par :
Organisme : toute entité biologique non cellulaire, cellulaire ou multicellulaire, capable de se reproduire ou de transférer du matériel génétique ; cette définition englobe les micro-organismes, y compris les virus, les viroïdes et les cultures de cellules végétales et animales ;
Organisme génétiquement modifié : organisme dont le matériel génétique a été modifié autrement que par multiplication ou recombinaison naturelles ;
Utilisation : toute opération ou ensemble d'opérations au cours desquelles des organismes sont génétiquement modifiés ou au cours desquelles des organismes génétiquement modifiés sont cultivés, stockés, transportés, détruits, éliminés ou mis en œuvre de toute autre manière.
Article L531-2 (Modifié par la loi n°2008-595 du 25 juin 2008 - art. 12)
Ne sont pas soumis aux dispositions du présent titre et des articles L. 125-3 et L. 515-13 les organismes génétiquement modifiés obtenus par des techniques qui ne sont pas considérées, de par leur caractère naturel, comme entraînant une modification génétique ou par celles qui ont fait l'objet d'une utilisation traditionnelle sans inconvénient avéré pour la santé publique ou l'environnement.
La liste de ces techniques est fixée par décret après avis du Haut Conseil des biotechnologies.
Article D531-2
Les techniques mentionnées à l'article L. 531-2, qui ne sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique, sont les suivantes :
À condition qu'elles ne fassent pas appel aux techniques de recombinaison de l'acide nucléique recombinant ou à des organismes génétiquement modifiés :
La fécondation in vitro ;
Les processus naturels tels que la conjugaison, la transduction, la transformation ou l'infection virale ;
L'induction polyploïde ;
A condition qu'elles n'impliquent pas l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés en tant qu'organismes récepteurs ou parentaux :
La mutagenèse ;
La fusion cellulaire, y compris la fusion de protoplastes, de cellules de n'importe quelle espèce eucaryote, y compris d'hybridomes, et les fusions de cellules végétales d'organismes qui peuvent échanger du matériel génétique par des méthodes de sélection traditionnelles ;
L'infection de cellules vivantes par les virus, viroïdes ou prions ;
L'autoclonage, qui consiste en la suppression de séquences de l'acide nucléique dans une cellule d'un organisme, suivie ou non de la réinsertion de tout ou partie de cet acide nucléique ou d'un équivalent synthétique, avec ou sans étapes mécaniques ou enzymatiques préalables, dans des cellules de la même espèce ou dans des cellules d'espèces étroitement liées du point de vue phylogénétique qui peuvent échanger du matériel génétique par le biais de processus physiologiques naturels, si le micro-organisme qui en résulte ne risque pas de causer des maladies pouvant affecter l'homme, les animaux ou les végétaux et s'il est utilisé en milieu confiné.
l'autoclonage peut comporter l'utilisation des vecteurs recombinants dont une longue expérience a montré que leur utilisation dans les micro-organismes concernés était sans danger.
On a vu plus haut que, pour la Directive 2001/18/CE, la mutagénèse est une "technique de modification
génétique à exclure du champ d'application, etc." La mutagénèse est bien un moyen de produire des organismes génétiquement modifiés; elle est listée à l'Annexe 1B. Simplement, elle est à exclure du champ d'application de cette Directive relative à la dissémination des OGM, donc à leur traçabilité.
On a vu également que, pour le Code de l'Environnement français, la mutagénèse est une "technique qui [n'est pas considérée] comme donnant lieu à modification génétique, etc." La France est beaucoup plus simplificatrice dans ses définitions. Comme la mutagénèse génère des mutations, donc des modifications du patrimoine génétique, il faut comprendre que c'est une technique "qui [a] fait l'objet d'une utilisation traditionnelle sans inconvénient avéré pour la santé publique ni l'environnement".
Mais alors, qu'est-ce donc que la mutagénèse ? C'est une technique qui consiste à soumettre une cellule à l'action d'un agent mutagène, afin d'obtenir des mutations. On a longtemps pratiqué la mutagénèse aléatoire, dans laquelle il n'y a pas moyen de prévoir quelles seront les effets du traitement. On utilise aujourd'hui des techniques de biologie moléculaire pour insérer un gène muté connu dans l'ADN d'une cellule (on parle alors de mutagénèse dirigée).
Ces produits chimiques et ces agents physiques sont utilisés pour produire de manière aléatoire, c'est à dire au hasard, des mutations. Pour des végétaux, on met des plantes, ou des graines en présence de l'agent mutagène, on les laisse en contact "un certain temps", puis on les récupère et on les fait germer.
Dans la majorité des cas, les mutations ont un effet désastreux sur la graine, qui ne survit pas. Parmi les plantules qui arrivent à pousser, certaines présentent un intérêt agronomique (elles portent plus de fruits, ou des fruits plus gros, ou sont moins exigeantes en eau, etc). On les multiplie un petit nombre de fois, pour vérifier que la mutation est stable, puis on les met sur le marché.
j'ai vu de mes yeux, dans les années 80, des chariots entrer et sortir d'une chambre d'irradiation, dont les fenêtres étaient en verre au plomb, épaisses de 80 centimètres. On y produisait, ce jour là, des œillets dont on m'assura alors qu'ils auraient probablement des pétales bi- ou tricolores, persillés, du plus bel effet. Un de mes correspondants m'a parlé de son expérience personnelle, lorsqu'il allait en courant déposer, puis rechercher, des échantillons de végétaux, exposés aux rayonnements émis par une source radioactive placée au fond d'un puisard cimenté, au bout d'un champ. Cela se passait dans un pays européen et francophone, dans un centre de recherches public, dans les années 1960...
Les végétaux génétiquement modifiés : des végétaux "normaux" ?
Les organismes obtenus par mutagénèse aléatoire sont des OGM (voir plus haut). Ils ne sont simplement pas soumis à l'obligation de traçabilité.
Partant du principe que les mutations sont un phénomène naturel, la mutagénèse aléatoire est donc réputée ne faire qu'accélérer ce processus naturel. Et donc, les organismes ainsi obtenus sont naturels.
Et qui dit "naturel" dit presque aussitôt "sans danger pour l'homme" - ce qui est une approximation très dangereuse, les toxines et poisons naturels étant souvent bien plus efficaces que les inventions de nos chimistes ! Mais en poussant (à peine) le raisonnement, on pourrait donc aller dans la région de Tchernobyl, dans laquelle poussent toujours des céréales, qui se sèment et se resèment de manière naturelle depuis maintenant 30 ans. Comme il se trouve que la radioactivité ambiante est là-bas un peu plus élevée qu'ailleurs, il n'est pas impossible que certains plants présentent une caractéristique intéressante pour les agronomes. Si c'était le cas, il ne serait point besoin de faire une quelconque étude de toxicité, ni de faire jouer le principe de précaution, n'est-ce pas?
Ce qui est gênant dans l'histoire, c'est qu'on a justement utilisé, de manière délibérée, un moyen articifiel pour obtenir une mutation qui n'était pas encore apparue naturellement. Mais les agents chimiques utilisés ne se retrouvent pas naturellement dans l'environnement; et les divers rayonnements sont, à la surface de la terre, bien moins intenses que ceux utilisés. Ainsi, la pression de sélection lors de la mutagénèse aléatoire n'est pas tout à fait une accélération de ce qui pourrait arriver naturellement.
Et donc, faire de ces OGM des organismes "naturels" relève d'un raccourci caricatural.
On reproche aux OGM leur capacité à disséminer leur pollen, donc leur gènes, dans le milieu naturel. C'est pourtant une capacité que possèdent la totalité des végétaux ! OGM ou pas ! Et on sait depuis longtemps que les gènes ne s'échangent pas tout seuls. Les agriculteurs exploitant des vergers de pêchers ne sont pas particulièrement préoccupés par une possible contamination de leurs fruitiers par du pollen de platane ou de vigne. À ma connaissance, aucun n'a jamais demandé à ce que des expertises soient menées afin de mesurer ce genre de risques. Les OGM obtenus par mutagénèse aléatoire ne font pas exception à la règle.
Certains avancent qu'ingérer des gènes recombinés fait courir des dangers à l'être humain. Mais si c'était le cas, il faudrait arrêter de consommer toute sorte de nourriture, car les gènes de navet, de bigorneau ou de champignon de Paris pourraient eux aussi entrer en interaction avec nos patrimoines génétiques !
On reproche également aux OGM de multiplier un gène qui n'est pas normalement présent dans l'organisme original. C'est également le cas pour les OGM obtenus par mutagénèse aléatoire !
On reproche enfin aux OGM le fait qu'ils soient des hybrides, que l'agriculteur ne peut pas semer à nouveau l'année suivante. Non seulement ce n'est pas systématique, mais encore le semis de variétés hybrides (dites "F1") n'est pas une nouveauté. Les générations d'étudiants qui sont allés "castrer les maïs" dans la vallée du Rhône ou en Midi-Pyrénées et qui en ont encore mal aux épaules pourraient en témoigner. On trouvait même il y a encore quelques temps des semences de carottes et de betteraves "bio" F1 provenant de mutants (dans le catalogue de Bejo).
Le "vrai" danger, en fait, on ne le connaît pas ! La mutagénèse aléatoire a fait apparaître au moins une mutation, celle qui a retenu l'attention des agronomes. Mais combien d'autres mutations sont apparues dans le même temps ? Sur quels gènes ? Quelles sont les protéines affectées ? Personne n'en sait rien, puisqu'on n'a même pas cherché à les identifier !
Le 15 septembre 2014, l'ANSES annonce le lancement du projet OGM 90+, financé à hauteur de 2,5 millions d'€ qui étudiera la toxicité à 6 mois. Le verbatim de la première réunion de l'instance de dialogue autour de ce projet est téléchargeable ici. Vous y lirez comment Greenpeace France, INF'OGM et la Confédération Paysanne ont annoncé qu'ils ne participeraient pas à cette instance de dialogue... Je n'ai pas réussi à trouver d'information sur les conclusions de l'étude elle-même sur le site de l'ANSES.
Des OGM obtenus par mutagénèse aléatoire - en plein champs ?
Il n'est pas aisé de savoir quelles variétés ont été obtenues par mutagénèse aléatoire, et plus encore quelles variétés ont été obtenues, par croisements "classiques", à partir de parents obtenus par mutagénèse aléatoire.
Si des organismes français tiennent à jour de telles listes, celles-ci ne sont pas accessibles au grand public. En revanche, c'est l'AIEA, l'Agence Internationale de l'énergie Atomique, celle-là même qui inspecte les installations en Iran ou ailleurs, qui qui gère avec la FAO la base de données la plus complète - à ma connaissance - sur les OGM...
Sur ce site, FAO/IAEA Mutant Varieties Database, on trouve plus de 2 500 variétés inscrites. Mais un "disclaimer" l'indique clairement : "bien que tous les efforts soient entrepris pour rechercher toute l'information appropriée, aucune assurance ne peut être donnée sur le fait que toutes les espèces mutantes officiellement diffusées soient inclues".
Pour la France, 42 variétés sont enregistrées, dont :
Vous irez vous-mêmes rechercher l'origine des semences utilisées pour faire les aliments et les ingrédients consommés via les aliments importés...
Sur un autre site, le FAO/IAEA Mutant Germplasm Repository, ou "Dépôt de Plasmas germinatifs Mutants" abrite quant à lui des informations sur les organismes mutants (en septembre 2014, cette base de données compte plus de 64 000 enregistrements !). Sur la page de recherche, sélectionnez seulement "Oryza sativa" (sans les guillemets) dans le champ "Latin name" dans la page "Advanced Field Search". Vous verrez que 814 variétés de riz ont été obtenues par mutagénèse aléatoire; par exemple les variétés Pygmalion (agent chimique) ou Marathon (rayons gamma). Ces variétés ont étéeacute; consommées, mais le Centre Français du Riz n'en fait plus mention. Ceci dit, des gènes de ces variétés peuvent fort bien se retrouver dans des descendants obtenus par croisements "classiques".
En cherchant bien, on trouve des extractions de la base FAO/AIEA, comme ce site japonais, avec une liste de près de 2000 variétés...
Si on recherche à présent quelles sont les variétés inscrites au catalogue du GEVES, le Groupe d'études et de Contrôle des Semences, on y trouve l'orge Baraka, inscrite depuis 1987. Il suffit pour cela d'aller sur la page du catalogue, de cliquer sur "catalogue plantes agricoles", sur "suite", puis de choisir "Hordeum vulgare" dans le champ espèce botanique.
Il semble bien qu'au moins une variété d'OGM obtenue par mutagénèse aléatoire soit aujourd'hui cultivée en plein champ...
Et puis, pourquoi ne pas les citer, les variété de pamplemousse "Ruby Red" et "Star Ruby" ont été obtenues par mutagénèse aléatoire; respectivement en 1984 et en 1970. Même chose pour le riz "delta", en 1970.
Le site Internet du Minsitère de l'écologie et du Développement Durable nous apprend que la notion de "principe de précaution" est apparue en Allemagne à la fin des années soixante (Vorsorgeprinzip), qui autorisait les pouvoirs publics à prendre "toute mesure nécessaire et raisonnable" face à des risques éventuels, même sans disposer des connaissances scientifiques nécessaires pour en établir l'existence.
On le retrouve ensuite dans plusieurs textes et traités, jusqu'à ce qu'il soit intégré dans les 27 principes de la Déclaration de Rio. Il s'énonce ainsi : Principe 15 : "Pour protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les états selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement."
En France, c'est à l'Article L.110-1 du Code de l'Environnement qu'on le retrouve. Il s'énonce : "Le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable."
On y est : le nœud du débat ne peut porter que là-dessus : les OGM font-ils courir des risques de dommages "graves ou irréversibles" à l'environnement ? Si la réponse est "oui", alors, pourquoi donc les OGM obtenus par mutagénèse aléatoire ne font-ils jamais l'objet de discussion, ou pourquoi ne remet-on jamais en cause l'absence d'essais et d'études de toxicologie ?
La seule hypothèse qui me semble plausible associe les deux éléments suivants:
une part de principe de réalité : si ces produits sont cultivés depuis des dizaines d'années, il est probable qu'ils ne font pas courir de risque grave à l'environnement...
et une part d'impuissance : comment retrouver tous les descendants de ces variétés mutantes, qui ont été semées, re-semées, hybridées ?
Les techniques modernes de biotechnologie, qui permettent d'insérer précisément un gène connu dans un végétal, sont infiniment plus sûres que les techniques de mutagénèse aléatoire. Il n'y a donc pas de raison de rejeter cette technique, si l'ancienne nous semble sûre.
L'équipe qui arrivera à insérer un gène de résistance à la sécheresse à un riz, par exemple, sera nommée Prix Nobel de la Paix ! Et téméraires seraient les faucheurs volontaires qui iraient essayer d'empêcher les premiers essais en champ.
Quant aux maïs OGM qu'on pourchasse ajourd'hui, on peut facilement leur trouver des défauts :
créer une variété résistante aux herbicides qui permettra aux agriculteurs de polluer un peu plus n'est pas forcément une bonne idée...
créer une variété résistante à la pyrale est plutôt une excellente idée, mais l'apparition de la pyrale résistante était alors inévitable : on aurait pu la prévoir...
Mais alors, expliquons au public qu'il faut refuser ces OGM-là, pas tous les OGM... Je crois que chacun peut comprendre où sont les combats à mener.